L'attaque à grande échelle du Hamas sur le sud d'Israël le 7 octobre 2023 a créé de nombreux précédents. Avec plus de 1 200 Israéliens tués, pour la plupart des civils, c'est le jour le plus sanglant de l'histoire juive depuis l'Holocauste. Contrairement à toute autre période de l'histoire d'Israël, y compris la guerre d'indépendance de 1948, les communautés juives ont été prises d'assaut et, dans certains cas, envahies par des militants arabes. Craignant une attaque similaire du Hezbollah, la milice islamique du Liban, des communautés entières situées le long de la frontière nord d'Israël ont été évacuées, condamnant leurs habitants - ici aussi, pour la première fois dans l'histoire du pays - à de longs mois de déplacement sans aucune fin en vue. L'opération militaire israélienne, qui en est à son septième mois, est la guerre la plus longue et la plus coûteuse jamais menée par Israël. 

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Malgré l'audace de l'attaque du Hamas, l'incapacité choquante des forces de défense israéliennes à assurer la sécurité a constitué une attaque directe contre le principe organisateur d'Israël et du sionisme. La quête de la souveraineté juive, concrétisée par la création de l'État juif, reposait sur le principe selon lequel les grands-mères juives ne pourraient plus être arrachées de leur lit et confrontées à la mort et aux mauvais traitements. Or, c'est exactement ce qui s'est passé le 7 octobre. 

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L'histoire d'Israël est jalonnée de triomphes militaires et ne comporte que peu de défaites, voire aucune. Le 7 octobre, Israël a été vaincu. Tout ce qui s'est passé depuis marque la lutte d'Israël pour accepter cette défaite. Pour les Israéliens, si habitués à la victoire, la défaite équivaut à l'anéantissement. Plongés dans le désespoir au lendemain de l'attaque d'octobre, les Israéliens ont été envahis par une angoisse existentielle qui a rapidement pris la forme d'une campagne militaire vengeresse ayant laissé une grande partie de la bande de Gaza en ruine. Malgré les attentes des Israéliens, le formidable effort militaire n'a pas permis de renverser la vapeur. La défaite n'a pas été remplacée par la victoire. Malgré les pertes énormes qu'il a subies, le Hamas est resté inflexible dans son refus de se rendre. La libération d'une grande majorité des otages israéliens - tous sauf trois - s'est faite grâce à un accord avec le Hamas, et non à la suite d'une opération militaire. Plus de 100 d'entre eux sont toujours en captivité, avec de grands doutes sur leur sort et leur bien-être. 

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Tout au long de l'année 2023 et jusqu'au mois d'octobre, Israël a été secoué par des manifestations de masse contre les tentatives du gouvernement de restreindre l'indépendance du système judiciaire. Cette vaste mobilisation - également sans précédent en Israël - sous la forme de centaines de milliers de manifestants luttant pour sauver la démocratie libérale (plutôt déficiente) du pays, s'est répétée après le 7 octobre. Des centaines de milliers d'Israéliens ont quitté leur domicile, soit pour rejoindre l'armée, soit pour participer à de nombreuses initiatives civiles de soutien aux personnes et aux communautés touchées. Les Israéliens se sont rassemblés, en uniforme ou non, pour s'apporter mutuellement réconfort et solidarité, deux éléments qui ont cruellement fait défaut le 7 octobre. 

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La crise du 7 octobre est venue s'ajouter à une société israélienne déjà en proie à des tensions et à des divisions internes. Mais malgré ces divisions, la société israélienne a fait preuve d'un niveau admirable de cohésion, et continue de le faire. L'importante communauté arabo-palestinienne, qui représente 20% des citoyens, est parvenue, au cours des deux dernières décennies, à un degré d'intégration considérable au sein de la majorité juive. La coexistence a pris une dimension normative : les Juifs et les Arabes ne vivaient pas seulement côte à côte (bien qu'avec une grande inégalité économique et juridique), leur participation à la vie publique était devenue omniprésente et notable. Les juges, les médecins, les étudiants et les fonctionnaires arabes mis à part, la manifestation ultime de cet état de fait est lorsque je vois une femme musulmane voilée conduire un bus à Tel-Aviv. Ce sont tous des membres du peuple palestinien, qui ont des affinités directes - parfois des relations familiales étroites - avec les habitants de Gaza. Malgré la grande volatilité de la situation ces derniers mois, l'équilibre délicat de la vie quotidienne a été maintenu. 

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Voici Israël au début de l'année 2024. Battu, angoissé, humilié, mais aussi accroché à la vie et tourné vers l'avenir. L'appareil photo de Raphael Gotheil est un témoin fidèle de ce moment, de ses incertitudes comme de son message d'espoir. 

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Texte de Gilad Halpern (Avril 2024)

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Gilad Halpern est un journaliste, personnalité de radio et historien des médias. Il est co-animateur du podcast Tel-Aviv Review et co-rédacteur en chef fondateur du magazine Tel-Aviv Review of Books.